Le projet d’extension de l’usine de chaux de Saint-Astier a motivé la prescription d’un diagnostic archéologique par le Service Régional de l’Archéologie de Nouvelle-Aquitaine, effectué par le Conseil Départemental de la Dordogne sous la direction d’A. Michel. Ce diagnostic a notamment révélé la présence de plusieurs ensembles sédimentaires contenant des vestiges lithiques rapprochés du Paléolithique moyen et une petite série de silex taillés mal caractérisée qui pourrait éventuellement correspondre à une occupation du Paléolithique supérieur. Dans ce niveau sédimentaire supérieur rapporté au Paléolithique supérieur, des restes de dent et mandibule possiblement attribués à du mammouth ont également été identifiés.
La fouille archéologique, particulièrement marquée par les intempéries et qui vient de s’achever, a été réalisée du 12 février au 12 avril 2024 sur une surface de 6100 m². Elle révèle une séquence sédimentaire composée de huit unités pédo-sédimentaires (UPS) reposant sur un substratum calcaire, localisé à une profondeur comprise entre 3 m et 4 m sous la surface du sol actuel (UPS 1) (selon un sondage profond et l’étude géotechnique). Ces calcaires sont surmontés de dépôts grossiers (UPS 6) correspondant à une terrasse alluviale de l’Isle, comprenant parfois des niveaux sableux (UPS 7). La morphologie du toit de la terrasse révèle l’existence probable d’un paléochenal orienté Est-Ouest dont l’extension spatiale reste à préciser et qui a été comblé par des dépôts fins limono-argileux relativement épais. De manière générale la séquence sédimentaire a une origine mixte (UPS 5 à 2). Elle est composée de dépôts fins de crue et de décantation (alluvions) dans un contexte plus ou moins marécageux et de dépôts de versants (colluvions). Localement, ces apports de versants deviennent prédominants et plus grossiers (UPS 8) vers le sommet de la séquence.
De très rares objets lithiques ubiquistes sont retrouvés dans l’UPS 2, tandis que des nappes de vestiges plus conséquentes ponctuées de petites concentrations de silex taillés sont observées dans l’UPS 3 et plus particulièrement dans l’UPS 4 (qui se caractérise notamment par sa richesse en concrétions ferromanganiques). Les objets archéologiques contenus dans ces deux UPS (3 et 4) sont rattachés sans nul doute à un ou des technocomplexes lithiques moustériens. Les premières observations de terrain ne mettent pas en évidence de distinctions entres les séries issues des UPS 3 et 4 sur les plans typo-technologiques. La composition des séries montre que toutes les phases de la chaine opératoire sont représentées sur le site depuis la mise en forme du bloc de matière première jusqu’à l’obtention de produits recherchés, voir la réalisation d’outils. L’outillage (rare) est essentiellement composé de racloirs et de bifaces (n = 8). La morphologie de certains éclats, parfois retrouvés dans de petites concentrations, évoque celle d’éclats de façonnage interrogeant ainsi sur la production de biface sur site. Les observations préliminaires faites sur le mobilier lors de la fouille témoignent de schémas opératoires Levallois de modalités variées (à éclat préférentiel, unipolaire, centripète et convergent) réalisés avec différents types de silex très probablement issus d’un espace extra-local et, dans une moindre mesure régional (silex du Sénonien et Bergeracois notamment).
La fouille a également livré quelques fragments de faune provenant des UPS 3, 4 et 6. Si leur état de conservation ne permet pas des identifications aisées, certaines observations plaident en faveur de restes de mammouths, au moins pour les ossements découverts dans l’UPS 3. Il est à souligner que ce type de découverte dans un tel contexte reste exceptionnel.